Euh, non mais, attention la populace délirante. Si je descends si loin dans la destruction ce n’est pas pour y rester non plus. Certains voudraient sans doute mettre une belle étiquette « œuvre au noir », « traversée des abysses », que sais-je ? Il n’en est rien. Je n’avance jamais que dans la destruction de l’ancien afin de renaître chaque fois, différent & cependant identique, frais de connaissances & de tous ces bagages qui font l’ennui. Si j’ai choisi cette « voie », je ne peux la recommander à personne. Si je sombre, loin, très loin même, ce n’est jamais dans l’espoir de crever ou de disparaître totalement. Bien au contraire, l’abîme sombre de ma psyché, de mes peurs, de mes démons est le lieu idéal d’un combat qui, toujours, me mène à affiner ce que « je suis ». Il n’y a aucune philosophie puante, aucune justification à mes actes, il n’y a qu’actes.
J’aimerais faire le bilan de ces périodes & cependant il ne s’agirait que de listes de petits déboires physiques, de cassures, de brisures des apparences, de la perte de personnes. Cependant, lorsque je me réveille de ces luttes avec mon anté-univers, je suis rené & vivant & agissant & disposé à regarder passer les cadavres du passé sans une once de regret.
Cette fois-ci, j’avoue peiné. Il m’a fallu en finir avec cette image de « père », ce père que j’exècre et que je suis retourné voir après 22 ans. Cela me restait depuis bien des années dans le fond de l’âme comme un miasme putride. J’ai vu un homme vieilli mais un homme, pas ce monstre que mon imagination avait voulu se forger afin de soutenir l’éloignement. Il n’y a pas d’« amour », ni plus de « haine ». Il reste un homme qui fut mon père, ou pas.
Dans le même élan, j’en ai fini avec ce théâtre fantasmatique que je fréquentais depuis quelques temps. Je m’étais perdu dans un imaginaire qui n’était pas le mien. Il était temps que je me défasse de cela & en tire les conséquences. Cela m’a coûté une nuit de ténèbres, la perte de quelque chose, mais au sortir je suis plus léger & plus heureux. Il est grand temps de passer à autre chose.
Lorsque l’on me demande :
« Pourquoi t’es-tu attiré
Dans le paradis du vieux serpent ?
Pourquoi t’es-tu glissé
Dans toi-même, dans toi-même ? » Nietzsche, Ecce Homo, p. 269.
Et bien je réponds que cela m’est aussi nécessaire que de respirer ou de chier. On me préférerait sans doute pâtre obéissant ou vaincu impuissant. Eh non, désolé, il ne s’agit que de moi, moi, moi.
Et, il ne s’agit pas ici de survie ou de quête spirituelle, arrêtons avec ces clichés. Il s’agit simplement de vivre selon un principe qui va bien au-delà du semper vivat, d’un hédonisme bon teint ou du connais-toi afin de niquer la race. Non, il s’agit de vivre comme je l’entends, pas moins, pas plus. Aucune morale, aucune philosophie, aucune religion ou croyance. Il n’y a de dieu que l’homme & j’en suis le prophète.
Deus est Demon Inversus.