Internet. Voilà un mot qui fait fantasmer le commun des mortels que nous sommes tous. Enfin un espace de liberté, une zone de partouze libre-échangiste d’idées, de mots, de coups de gueule, d’autoglorifications… Bref, un foutoir cosmik pour extravertis comiques. Un Eden électronique qui permet de tout dire sans annoncer son existence réelle : qui pense que tous ces zigs qui publient sur le net existent réellement ? M’enfin, comment voulez-vous que ces millions de messages éjaculatoires soient l’œuvre de simplets citoyens mondialisés et acculturés ?
Et pourtant, si, il y a bien des personnes qui avaient des choses à dire depuis l’avènement de notre Saint Sauveur mais faute de médium, le silence régnait sur cette terre tombée dans un matérialisme ron-ron bon enfant !!! Ces personnes réduites au silence ont pu enfin s’exprimer librement si ce n’est libertairement sur cet espace inexistant et pourtant bien présent qu’est l’INTERNET. Ironie du sort, ce nouveau médium est sorti de l’imagination fébrile de militaristes en peine de communications intra- voire inter-armées ! Ainsi, donc, après un ravalement de façade libertarien-consumériste, tout-qui-veut peut enfin placer son caca plumitif sur les ondes mégatroniques de l’internet cosmo-planétaire. Quelle chance pour la démocratie, la défense des pingouins hémiplégiques et autres politiciens en mal de reconnaissances médiatiques (hein M’sieur Gore ?).
Bibi, auteur de cet article binaire, comprend vite qu’internet c’est aussi pour lui et, bien vite, il s’arme d’un PC, d’un butineur et d’une connexion. Et le voilà catapulté sur l’onirique grande toile… Ouawouwa ! Quel air frais, quel sentiment de puissance, que de choses bandantes dans cet espace ouvert et multi-culturel qu’est le oueb !!! Je commence alors à lancer des e-mails dans tous les sens : en Amérique, en Afrique, en Belgique, au Togo puis je passe au butinage en lui-même, sélectif, professionnel et bordélique surtout. Les mois passent et je monte mon propre site oueb, mon espace de liberté éditoriale, mon p’tit paradis à moi quoi. Les choses étaient alors super, pleins de contacts enrichissants, des potes électrisés et inaccessibles, des engueulades, des bisous, des infos à la pelle. Bref, le bonheur solitaire bon ton de fin de millénaire.
Mais voilà, après ces années de jouissance solitaire quoique partagée, il apparaît bien vite que l’internet c’est un peu vide… Car, enfin, à force de communiquer n’oublie-t-on pas le plus important, c’est à dire faire passer un message. Vous avez déjà été sur un groupe de discussion et essayé de tenir plus d’une semaine ? Oui, alors vous êtes fortiche car moi, après deux-trois jours je déconnecte. La dernière fois, j’ai reçu après deux heures d’inscription près de 300 messages !!! Trois plombes pour décortiquer le tout et se rendre compte que rien n’est dit en définitive, il en ressort juste une légère brise ionisée bien vite oubliée. Quant aux sites persos là on entre dans une purée multicolore qui donne le vertige après deux ou trois heures de butinages voyeuristes. Des astrologues, des anarchistes, des nazillons, des contre-nazillons, des pubs, des pubs, encore des pubs, des banques, du sexe, des pubs, du sexe, du sexe, des pubs, des folies affolantes et d’affolantes folies, du vide, URL not found, du sexe, de la pub, des magiciens en robe Chanel, des pubs et pour finir Le Figaro en ligne déversant sa prose néo-droitiste libérale psycho-rigide… Tout un programme pour psychanalyste désabusé !
Et on y voit de tout sur l’internet. Des zozos zébrés du bulbe comme votre serviteur, des fanatiques de la communication outrancière, des fanatiques tout court, des illuminés (mystiques, politiques, …), des oculistes occultistes, des bazars de l’épouvante, des livres en ligne avec phôtes d’auretografes, des hommes cherchant femmes, des femmes cherchant hommes, des hommes cherchant chiens et des chats n’y retrouvant même pas leurs petits. Un vrai bordel où tout est dit en ligne, en temps réel, avec mise à jour automatique, en javascript ou an ASP et ce pour le plus grand plaisir d’intoxiqués de l’info.
Arrivé à un tel point, on a deux solutions : le suicide du disque dur ou bien la déconnexion définitive. Enfin, non, il reste aussi la possibilité de continuer à y croire et chercher d’autres façons d’utiliser cet outil, car ce n’est rien d’autre qu’un moyen d’action et non une fin en soi, qui peut mener à changer véritablement le monde. Et c’est ainsi que je suis tombé sur Uzine et Minirézo qui, à mon sens, offrent une capacité d’interagir et de vraiment communiquer et donc de s’enrichir d’expériences, mais aussi de savourer des bons mots dans une optique anti-mondialiste et critique. Ce qui franchement fait du bien après des mois à se demander « Mais qu’est-ce-que je suis venu faire dans cette galère ? »